Strasbourg, le 9 octobre 2000 |
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COMMISSION EUROPEENNE POUR LA DEMOCRATIE PAR LE DROIT
(COMMISSION DE
VENISE)
Cour constitutionnelle
de la République de Slovénie
Décision no.
U-I-214/00-4
du 14 septembre 2000
RÉPUBLIQUE DE SLOVÉNIE
COUR CONSTITUTIONNELLE
Numéro
: U-I-214/00 - 4
Date :
14.9.2000
RÉSOLUTION
La Cour constitutionnelle, dans la procédure d’examen de
l’initiative déposée par Ante Belobrajdič, domicilié à Koper, lors de sa séance du 14 septembre 2000 a décidé que :
1. L’initiative visant à engager une procédure de
contrôle de la constitutionnalité des points I et II de la Loi
constitutionnelle sur les annexes apportées à l’article 80 de la Constitution
de la République de Slovénie (Journal officiel de la RS, no. 66/2000) est
rejetée.
2. L’initiative visant à engager une procédure de
contrôle de la constitutionnalité du Décret de promulgation de la Loi
constitutionnelle sur les annexes apportées à l’article 80 de la Constitution
de la République de Slovénie (Journal officiel de la RS, no. 66/2000) est
rejetée.
3. L’initiative visant à engager une procédure de
contrôle de la constitutionnalité du Décret fixant la date des élections
régulières de l’Assemblée nationale (Journal officiel de la RS, no. 67/2000)
est refusée.
Motivation
A.
1. L’auteur de l’initiative conteste la Loi
constitutionnelle sur les annexes apportées à l’article 80 de la Constitution
de la République de Slovénie (ci-après : loi UZ80), car ses points I et II
seraient contraires aux dispositions du quatrième paragraphe de l’article 80 et
du premier paragraphe de l’article 90 de la Constitution. Vu que le quatrième
paragraphe de l’article 80 de la Constitution, qui fixe que le mode de scrutin
de l’Assemblée nationale est adopté par l’Assemblée nationale à la majorité des
deux tiers de tous les députés est resté en vigueur, il estime que ces deux
dispositions sont maintenant en contradiction. Il avance en particulier le motif que l’Assemblée
nationale aurait dû respecter la volonté exprimée par référendum quant au mode
de scrutin et respecter le premier paragraphe de l’article 90 de la
Constitution qui fixe que les députés sont astreints au résultat de référendum.
En adoptant la loi UZ80, l’Assemblée nationale n’aurait pas voulu tenir compte
de cette disposition constitutionnelle, étant persuadé que dans un tel cas il
n’est pas astreint à la décision du référendum. Cela serait également contraire
à la définition constitutionnelle selon laquelle la Slovénie est un Etat de
droit et démocratique.
2. L’auteur de l’initiative conteste aussi le Décret de
promulgation de la Loi constitutionnelle sur les annexes apportées à l’article
80 de la Constitution de la République de Slovénie (ci-après : décret ODUZ80)
et le Décret fixant la date des élections régulières de l’Assemblée nationale
(ci-après : Décret fixant la date des élections), mais il ne cite pas en quoi
ils seraient inconstitutionnels ou illégaux ; il ne cite pas non plus les
raisons qui montreraient leur inconstitutionnalité ou illégalité.
3. L’auteur fonde son intérêt légal sur le fait qu’en
tant que citoyen il est aussi électeur et que pour cela, il est intéressé par
l’institution du mode de scrutin majoritaire à deux tours pour lequel il s’est lui même prononcé au référendum.
B.
4. L’un des points de départ procéduraux pour engager une procédure devant la Cour
constitutionnelle est la compétence de celle-ci. La compétence de la Cour
constitutionnelle est fixée par l’article 160 de la Constitution et l’article
21 de la Loi sur la Cour constitutionnelle (Journal officiel de la RS, no.
15/94 - ci-après : loi ZUsZ). Les deux dispositions mentionnées ne déterminent
pas, parmi les compétences de la Cour constitutionnelle, des compétences pour l’appréciation de conformité réciproque
entre les décisions constitutionnelles, pas même de compétence pour le contrôle
de la constitutionnalité des dispositions contenues dans la loi
constitutionnelle.
5. La Cour constitutionnelle a déjà rencontré cette
question de la compétence pour le contrôle de la constitutionnalité des
dispositions de la loi constitutionnelle dans le cas no. U-I-332/94 (OdIUS V,
42). Dans l’affaire citée, l’auteur a contesté la constitutionnalité de
certaines décisions de la Cour constitutionnelle concernant les annexes
apportées à la Loi constitutionnelle pour l’application de la Charte
fondamentale sur l’autonomie et l’indépendance de la République de Slovénie
(Journal officiel de la RS, no. 45/94). La Cour constitutionnelle a rejeté
cette initiative pour non compétence (résolution no. U-I-332/94 du 11.4.1996).
Dans la motivation de la résolution de rejet, la Cour constitutionnelle a
déterminé les critères qui devraient être remplis pour que la cour puisse
apprécier la constitutionnalité des dispositions, qui seraient et même si elles
l’étaient, contenues dans la loi constitutionnelle (troisième et quatrième
point de la motivation de la résolution).
6. Dans la procédure d’examen du cas no.U-I-332/94, la
Cour constitutionnelle a constaté que l’article 174 de la Constitution
détermine seulement que “pour l’application de cette Constitution et pour
assurer la transition à l’utilisation des dispositions de cette Constitution,
la loi constitutionnelle est adoptée”. En même temps, la Cour soulignait que
cela ne signifiait pas qu’il s’agissait de l’unique catégorie de loi
constitutionnelle et que l’Assemblée nationale ne pourrait adopter une loi
constitutionnelle dans un but différent et d’un contenu différent pour autant
que sa nature relève du droit constitutionnel.
Il s’ensuit que la Cour constitutionnelle, déjà dans la procédure
d’examen de l’initiative citée dans le cas de la loi constitutionnelle de
l’article 174 de la Constitution, a défini comme critères pour constater ses
compétences des critères formels, et aussi des critères matériels dans les
autres cas de l’organisation de la matière déterminée par la loi
constitutionnelle.
7. Dans la pratique de l’organe constituant en cours
jusqu’à présent (après l’adoption de la Constitution en vigueur), la forme de
la loi constitutionnelle s’est affirmée aussi comme forme d’acte de révision de
la constitution (article 169 de la Constitution). L’organe constituant a
utilisé la loi constitutionnelle comme acte de révision de la Constitution pour
la révision de l’article 68 de la Constitution (Loi constitutionnelle portant
révision de l’article 68 de la Constitution de la République de Slovénie -
UZS68, Journal officiel de la RS, no. 42/97). La loi constitutionnelle
s’utilise donc comme acte par lequel la Constitution est révisée, ses
dispositions sont pour cette raison des dispositions constitutionnelles,
indépendamment de leur contenu ou de leur nature. En outre, elle est utilisée
aussi comme acte par lequel sont déterminées l’application et la transition à
l’utilisation des dispositions constitutionnelles (y compris celles qui
signifient des révisions de la Constitution adoptées par une loi
constitutionnelle). Les dispositions contenues dans une telle loi
constitutionnelle sont des dispositions qui représentent la matière du droit
constitutionnel si elles réglementent l’application ou la transition à une
autre organisation constitutionnelle. La loi constitutionnelle s’utilise aussi
comme acte que l’organe constituant peut adopter avec un but différent et un
contenu différent - donc pas dans le but et avec le contenu d’une révision des
dispositions constitutionnelles ou bien d’application et de transition à
l’utilisation des dispositions constitutionnelles. Seulement dans cette forme
de la loi constitutionnelle, le critère matériel est déterminant pour décider de la compétence de la Cour
constitutionnelle - donc le contenu et la nature des dispositions contenues
dans la loi constitutionnelle.
8. La loi constitutionnelle contestée (loi UZ80) se
divise en deux points. La disposition du point I complète le texte de la
Constitution et représente donc une révision de celle-ci, c’est-à-dire de son
article 80. L’organe constituant a, il est vrai, employé l’expression “annexes”
(“complément”) et non l’expression de droit constitutionnel “révision”, mais il
s’agit selon l’appréciation de la Cour constitutionnelle, pour la disposition
du point I de la loi UZ80, d’une révision de l’article 80 de la Constitution.
En effet, dans cet article, l’organisation de la matière électorale est divisée
entre la Constitution et la loi. La Constitution fixe le système électoral sous
sa forme la plus générale, l’application du système ainsi déterminé est laissée
à la loi. La Constitution contient une division semblable aussi pour le
référendum législatif (article 90) et dans la désignation de la réglementation
législative, elle utilise dans les deux cas la même diction (quatrième
paragraphe de l’article 80 et cinquième
paragraphe de l’article 90 de la Constitution). Où commence la réglementation
législative et jusqu’où va la réglementation du droit constitutionnel est une
question du domaine de l’appréciation de l’organe constituant. Etant donné que
le point I contesté change la matière, qui fait même déjà partie de la matière
de la Constitution, il en est devenu
incontestablement une partie. Pour cela, du point de vue de la décision sur la
compétence de la Cour constitutionnelle, la disposition du point 1 de la loi
UZ80 traitée, ne serait-ce que sous un critère formel, représente une
disposition constitutionnelle. Et comme telle, ne pouvant être objet d’une
appréciation du droit constitutionnel, la Cour constitutionnelle a rejeté
l’initiative de contrôle de l’UZ80 en tant qu’elle se rapporte à son point I,
pour cause de non compétence (premier point du dispositif de la résolution). La
Cour constitutionnelle a décidé de la même façon aussi par ex. dans la
résolution no. U-I-195/97 du 29.1.1998 du décret OdIUS VII, 19).
9. Les dispositions du point II de la loi UZ80 fixent
d’abord que l’élection des députés à l’Assemblée nationale en 2000 et jusqu’à
l’entrée en vigueur des révisions de la loi qui règle les élections de
l’Assemblée nationale, se réalise aux termes de la Loi sur les élections de
l’Assemblée nationale (Journal officiel de la RS, no. 44/92 et suiv. - ci-après
: la ZVDZ) ; plus loin, elles fixent la façon d’employer ou de ne pas employer
certaines dispositions de la ZVDZ. À la différence du point I de la UZ80, les
dispositions de son point II ne représentent pas de modifications du texte de
la Constitution. Pour cela, concernant
ce qui est cité aux points six et sept de la motivation de cette décision pour
les besoins de la prise de décision sur la compétence de la Cour
constitutionnelle, il faut pour leur appréciation, tout d’abord constaté de
quelle catégorie de loi constitutionnelle il s’agit.
10. Comme la Cour constitutionnelle l’a déjà cité au
point huit de la motivation de cette résolution, la Constitution divise
l’organisation de la matière électorale entre l’organe constituant et l’organe
législatif. Elle fixe le mode de scrutin dans sa forme la plus générale, tandis
que l’exécution du système ainsi déterminé est laissée à la loi - la ZVDZ (quatrième paragraphe de l’article
80 de la Constitution). Celle-ci peut bien sûr être objet d’un jugement
constitutionnel. Etant donné la division ainsi déterminée de la matière entre
la Constitution et la loi, le contenu du point II de la UZ80 - mis à part le
dernier paragraphe - est essentiellement
matière de la loi puisqu’elle ne réglemente pas (elle révise et
complète) la matière qui ferait déjà partie de l’organisation constitutionnelle
du système électoral. Comme telle, elle a sa place dans une loi particulière
que prévoit le quatrième paragraphe de l’article 80 de la Constitution. D’après
le contenu du premier paragraphe du point II de la UZ80, il découle aussi que
le but de l’organe constituant était de déterminer expressément que les
élections des députés à l’Assemblée nationale en 2000 se dérouleraient selon la
ZVDZ avec les quelques modifications qu’il a lui-même fixé. Ces modifications
devraient être en vigueur pour les élections 2000 et jusqu’à ce que les
modifications de la loi qui réglemente les élections à l’Assemblée nationale
entrent en vigueur. Les dispositions du point II de la UZ80 réglementent donc
la matière qui est et sera aussi à l’avenir objet de l’organisation par la loi. De telles
décisions pourraient par conséquent, de par elles-mêmes, en considération du
critère matériel être objet d’un jugement dans une procédure devant la Cour
constitutionnelle si leur but n’était pas d’assurer la transition à une
nouvelle réglementation
constitutionnelle.
11. Comme le Conseil constitutionnel l’a déjà constaté
dans le point huit de la motivation de cette résolution, le point I de la UZ80
signifie une révision de la réglementation constitutionnelle du système
électoral. Il a introduit un scrutin selon le principe de la représentation
proportionnelle avec un seuil de quatre pour cent ; il a fait valoir la demande
pour une influence déterminante des électeurs dans la répartition des mandats
des candidats. Il s’agit par conséquent d’une réglementation constitutionnelle
modifiée qui vu la législation électorale existante, a exigé la détermination
de l’exécution et l’assurance de la transition à l’application de la réglementation
modifiée. C’est justement ce que l’organe constituant a fait aux termes du
premier paragraphe de l’article 174 de la Constitution par les dispositions du
premier paragraphe du point II de la UZ80. Selon l’appréciation de la Cour
constitutionnelle, il s’agit donc de dispositions qui réglementent les
questions de la transition à une nouvelle
organisation constitutionnelle et qui feront aussi partie du contenu de
la ZVDZ. Elles ont par conséquent (déjà par le critère formel) le caractère de
normes de droit constitutionnel pour le jugement desquelles la Cour
constitutionnelle n’est pas compétente. Pour cela, l’initiative pour le
contrôle de la constitutionnalité de la UZ80 a été rejetée aussi dans la partie qui se rapporte
à son point II (premier point du dispositif).
12. L’acte de révision de la Constitution (article 169 de
la Constitution) qui est adopté par l’Assemblée nationale à la majorité des
deux tiers est une loi constitutionnelle. En ce qui concerne l’entrée en
vigueur des modifications constitutionnelles adoptées avec lui, la Constitution
dans l’article 171 fixe qu’elles entrent en vigueur avec leur promulgation. La
promulgation est par elle-même un acte qui a un fondement direct dans la
Constitution, ou, s’il s’agit d’une loi exécutive ou d’une autre catégorie de
loi constitutionnelle, dans la loi constitutionnelle. Pour réaliser cet acte,
l’Assemblée nationale n’a pas besoin d’adopter de règlement particulier. Pour
cela aussi le ODUZ80 contesté ne peut être considéré comme un règlement pour
lequel la Cour constitutionnelle serait compétente dans l’appréciation de la
constitutionnalité. Il s’agit d’une acte individuel par lequel la promulgation est réalisée. Comme
les actes individuels ne peuvent être objet d’un jugement de droit
constitutionnel dans la procédure entamée avec l’initiative, la Cour
constitutionnelle a rejeté l’initiative pour contrôle de constitutionnalité du
ODUZ80 (deuxième point du dispositif).
13. Selon la ZVDZ, la date des élections régulières est
fixée par le Président de la République (article 14). Aux termes de la
Constitution, les élections régulières se déroulent tous les quatre ans, la
Constitution détermine point par point aussi les exemples et les conditions
pour prolonger le mandat des députés (premier et deuxième paragraphe de
l’article 81). La ZVDZ détermine exactement les délais pour fixer la date et le
déroulement des élections. De la même façon, elle détermine aussi le contenu de
l’acte concernant l’annonce de la tenue des élections (article 16). Il s’agit
d’un acte promulgué par le Président de la République et qui signifie le début
de la procédure électorale. L’auteur de l’initiative ne mentionne pas
expressément en quoi le Décret sur la date des élections serait
anticonstitutionnel et illégal ; de la seule initiative, il ressort qu’il
propose son abrogation en relation avec la partie de l’initiative qui se
rapporte à l’abrogation de la UZ80. Comme conséquence de l’abrogation de la loi
constitutionnelle contestée, la Cour constitutionnelle serait censée aussi
abroger la date fixée pour les élections. Vu que la Cour constitutionnelle a
rejeté l’initiative pour le contrôle de constitutionnalité de la UZ80,
l’initiative pour le contrôle de la constitutionnalité du Décret fixant la date
des élections est, en considération de la disposition UZ80, de toute évidence
infondée. Pour cela, elle a été refusée en tant que telle par la Cour
constitutionnelle (troisième point du dispositif).
14. Etant donné que la Cour constitutionnelle a rejeté
l’initiative en partie pour non compétence et qu’elle l’a refusé en partie comme étant de toute évidence sans fondement,
elle n’a pas considéré la question de l’intérêt légal de l’auteur de
l’initiative.
C.
15. La Cour constitutionnelle a adopté cette résolution
sur la base de l’article 21 et du deuxième paragraphe de l’article 26 de la
ZUstS et du premier alinéa de l’article 52 du Règlement de la Cour
constitutionnelle de la République de Slovénie (Journal officiel de la RS, no.
89/98). Composition de la Cour : le Président Franc Testen et les juges dr.
Janez Čebulj,
dr. Miroslava Geč-Korošec, Lojze Janko, Milojka Modrijan, dr. Mirjam Škrk,
dr. Lojze Ude, dr. Dragica Wedam-Lukić. La résolution a été adoptée à l’unanimité.
Le
Président
Franc
Testen